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Terrorisme : « On ne peut plus pleurer les victimes sans rien changer »

Ministre de l’Intérieur dans le shadow cabinet des Républicains, le député niçois Eric Ciotti propose plusieurs mesures pour lutter plus efficacement contre le terrorisme.

Si vous étiez le vrai ministre de l’Intérieur, quelles décisions prendriez-vous aujourd’hui?
« Dans la quasi-totalité des attentats qu’a subis la France depuis 2015, qui ont fait 249 morts et plus de 900 blessés, les auteurs avaient été préalablement identifiés par nos services de renseignement. La vraie question est donc de savoir comment empêcher de passer à l’acte ceux dont on a déterminé la dangerosité, les fameux « fichés S ». Je ne me résoudrai jamais à un statu quo qui se réfugie derrière l’état de notre droit actuel. On dénombre 20.400 personnes signalées pour radicalisation terroriste, dont 397 dans les Alpes-Maritimes. Si j’étais en responsabilité, je proposerais donc trois mesures immédiates. »

Lesquelles?
« D’abord, l’expulsion des 4.041 étrangers, soit environ 19% des « fichés S », qui présentent une menace terroriste pour notre nation. Comment concevoir qu’un étranger accueilli en France, et qui la menace, puisse demeurer librement dans notre pays? Il faut immédiatement retirer tout titre de séjour à ces personnes et les expulser. »

Mais comment les expulser sur une simple suspicion de passage à l’acte?
« Il faut que notre pays retrouve une forme de souveraineté. Le titre de séjour doit pouvoir être enlevé pour un motif d’ordre public. Le droit au séjour ne peut pas être absolu. C’est à la France de déterminer qui elle veut garder sur son territoire. Il nous faut rompre avec la naïveté. »

Vos deux autres propositions?
« Il faudrait mettre en place une rétention de sûreté pour les radicalisés qui vont sortir de prison. Dans l’année qui vient, 500 islamistes, sur les 2.000 détenus, vont sortir de prison. Ils constituent un danger majeur, sans doute le plus grave auquel on est exposé. Je suggère donc de leur imposer le même dispositif d’évaluation que celui mis en œuvre par Nicolas Sarkozy pour les criminels sexuels. »

Sur quels critères pourra-t-on les évaluer sans se faire berner?
« La règle doit être un principe de précaution, en faisant évaluer la dangerosité par une commission spécialisée incluant des membres de l’administration pénitentiaire, du renseignement, mais aussi des psychiatres, comme c’est le cas pour les criminels sexuels. »

Votre troisième mesure?
« Elle viserait à instaurer une rétention administrative pour les plus dangereux des « fichés S » non étrangers. Il ne s’agirait pas d’enfermer tout le monde, mais de disposer d’un outil juridique d’intervention en cas de soupçon grave et imminent. Pour les autres, un bracelet électronique géolocalisé nous garantirait une meilleure protection. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut plus rester dans le système actuel et, à chaque attentat, pleurer les victimes tout en disant qu’il ne faut surtout rien changer. »

Vous appelez par ailleurs au rétablissement de l’état d’urgence. Quel en serait donc l’intérêt?
« L’état d’urgence offrait aux préfets des outils de police administrative qui permettaient de vérifier des soupçons d’attentat. Ils ont permis d’en déjouer plusieurs. Pendant l’état d’urgence, il y a eu 4.600 perquisitions administratives préventives, qui ont conduit à 400 gardes-à-vue. Depuis la fin de l’état d’urgence, on est tombé à 76 visites domiciliaires en un an, dont 40 à peine ont donné lieu à une saisie. Dans les Alpes-Maritimes, il y a ainsi eu zéro perquisition administrative, cette mesure est devenue inopérante. Il en va de même pour les assignations à résidence, qui permettaient de contrôler des individus dangereux. Désormais, l’assignation est élargie à une ville entière. Il est donc faux de dire que les mesures de l’état d’urgence ont été retranscrites dans la loi. Enfin, on n’éradiquera pas le terrorisme islamiste si l’on n’est pas implacable sur la laïcité: il faut fermer les mosquées salafistes, combattre le port du voile dans les services publics et lutter sans répit contre le communautarisme. Ce qui implique de stopper nos flux migratoires, soit l’inverse de ce que fait la France en votant le pacte de Marrakech. »