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« Mon ambition, c’est de réarmer l’État »: retrouvez mon interview dans Valeurs Actuelles.

J’ai déposé cette semaine à l’Assemblée nationale deux textes de loi pour réarmer l’Etat face au terrorisme et à la menace liée à la délinquance, qui ne cesse de grandir dans notre pays. Mon texte propose 100 mesures concrètes et un investissement de 14 milliards d’euros sur cinq ans. J’explique en détail ce texte et ses ambitions dans une interview à Valeurs Actuelles que je reproduis ici. Bonne lecture.

Que vous inspire l’ « affaire Théo » ?

La justice doit dire si des fautes ont été commises et les sanctionner. Mais un comportement individuel ne doit pas faire oublier le lourd tribut payé par nos policiers et nos gendarmes- 26 morts et 16.000 blessés en service l’an dernier – ni servir de prétexte pour légitimer la violence des racailles, comme nous l’avons vu à Bobigny.

Le passeur de migrants Cédric Herrou, condamné la semaine dernière, a évoqué une «course aux Noirs» des policiers. Vous avez demandé au ministre de l’Intérieur, Bruno Le Roux, de porter plainte. Avez-vous eu une réponse ?

Non, et je m’en étonne. S’il ne le faisait pas, il se rendrait complice de ces propos honteux. Quant à moi, je ne laisserai plus cet individu insulter des milliers d’agents du département des Alpes-Maritimes dont j’ai la charge et qui accueille, conformément à la loi, plusieurs centaines de mineurs étrangers isolés.

Quelle est votre ambition avec les deux textes que vous présentez ?

La menace terroriste est maximale, la délinquance est à un niveau jamais atteint. Je veux rétablir d’urgence l’autorité républicaine. Je propose une centaine de mesures concrètes. Mon ambition, c’est de réarmer l’État et de l’adapter aux nouvelles menaces, de réhabiliter la sanction pénale et enfin de recentrer la police sur ses missions prioritaires. J’appelle cela les « 3R ». L’objectif, c’est aussi de programmer pour les huit années à venir les moyens nécessaires. J’installe une démarche totalement novatrice : sécurité et justice ne doivent plus s’opposer ! L’une ne va pas sans l’autre.

Les moyens actuels sont insuffisants ?

Très clairement ! Vous savez, sous le général de Gaulle, en 1965, l’État consacrait 6,5 % de la richesse nationale à la défense, à la sécurité et à la justice. Aujourd’hui, cet effort n’atteint même pas les 3 %. Je souhaite qu’on engage un effort budgétaire exceptionnel pour que, en 2025, nous consacrions 1 % du PIB à la sécurité, 0,5 % à la justice et 2 % à la défense. Je prévois 14 milliards d’euros de dépenses supplémentaires sur le quinquennat pour la sécurité et la justice. Cela représente moins de 3 milliards en plus par an, à comparer à la gabegie des dépenses publiques pour la formation ou pour l’emploi, qui s’élèvent à plus de 30 milliards d’euros…sans efficacité.

Vous souhaitez que la police se recentre sur ses missions…

Comment accepter que ceux qui nous protègent perdent leur temps dans des tâches indues? Il faut alléger les procédures pour que les policiers fassent leur métier : assurer la sécurité ! Quant aux sociétés de sécurité privée, elles pourraient être chargées de certaines activités de surveillance. Les polices municipales auraient la possibilité de contrôler les identités; et les forces de sécurité intérieure pourraient fouiller des véhicules ou des bagages à titre préventif.

Vous souhaitez que les peines de prison soient véritablement exécutées…

C’est même l’une des mesures phares. Aujourd’hui, 100.000 peines de prison ne sont pas exécutées. Si quelqu’un est condamné à de la prison ferme, il doit aller en prison. Les réductions et les aménagements de peine doivent être une exception et non la règle.

Vous souhaitez revenir sur la réforme pénale de Christiane Taubira?

Christiane Taubira a créé la sanction sans la prison. C’est un message laxiste et dangereux. Plus la sanction est forte, plus elle est dissuasive. Mais pour cela, il faut pouvoir disposer, à l’horizon2025, de 80.000 places de prison, contre à peine 59.000 aujourd’hui. Je prévois la construction de 16.000 places d’ici à 2022 et le recrutement de 1.000 magistrats, greffiers et assistants de justice, tout en mettant un terme à la paupérisation de l’institution.

Vous souhaitez créer un parquet national antiterroriste. Est-ce vraiment nécessaire, car le parquet de Paris est déjà compétent?

Le parquet de Paris accomplit un travail remarquable, mais l’augmentation des affaires de terrorisme, qui est de 26 % en un an, me porte à croire qu’il faut un procureur national qui ne s’occupe que de ces affaires. Celui-ci devra s’appuyer sur une cour spéciale, qui jugera précisément ces crimes.

Accusez-vous le gouvernement de ne pas en avoir fait assez dans la lutte contre le terrorisme?

J’ai toujours été aux côtés du gouvernement pour voter en toute responsabilité l’état d’urgence ou la loi sur le renseignement. Mais, aujourd’hui, 700 ressortissants français sont engagés dans les rangs de l’État islamique et vont peut-être rentrer en France. Nous devons changer d’approche dans le traitement de ces individus fanatisés, en anticipant plutôt qu’en subissant. Je propose, pour ceux-là, une mesure de rétention administrative, ainsi que l’expulsion des délinquants étrangers et la possibilité de faire payer leur peine de prison à ceux qui le peuvent.

Personne n’a encore trouvé la solution pour la déradicalisation.Est-ce un aveu d’impuissance?

Récemment, on a appris que le seul centre de déradicalisation ouvert, en Indre-et-Loire, était vide. Je vais vous dire pourquoi: le gouvernement a choisi d’y envoyer uniquement les fanatiques qui sont volontaires! Ce n’est pas une blague ! Pour moi, un individu signalé doit être surveillé, voire enfermé si c’est nécessaire. Il faut aussi isoler les détenus radicalisés en prison afin d’éviter le prosélytisme. Quant à la déradicalisation, elle est pour l’heure impossible, si ce n’est pour certains cas individuels.

Propos recueillis par L. de R.