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Éric Ciotti : "Notre système du droit d'asile explose !" – Le Point

Le Point : Manuel Valls encourage les naturalisations comme étant l’achèvement d’une intégration réussie. Comprenez-vous sa politique ? Éric Ciotti : Le ministre de l’Intérieur redore ainsi son image d’homme de gauche chahutée par l’affaire Leonarda. Moyennant quoi, il ouvre les vannes de l’immigration, puisqu’il a doublé le nombre des naturalisations et régularisé 36 000 sans-papiers, soit 16 000 personnes de plus. La France compte, en outre, près de 70 000 demandeurs d’asile, c’est le record historique ! Les vannes aspirantes de l’immigration se sont ouvertes. Le schéma est explosif ! D’où proviennent les demandeurs d’asile aujourd’hui ? Principalement d’Albanie en hausse de 446 %, de Bosnie-Herzégovine en progression de + 335 % et du Kosovo dans les mêmes proportions. Trois pays qui ne sont pourtant pas dans une situation de persécutions politiques. Mais c’est le Conseil d’État qui, dans une décision du 26 mars 2012, a maintenu l’Albanie et le Kosovo dans la liste des pays dont les populations sont à protéger contre une décision inverse de l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides, NDLR). L’affaire Leonarda a mis l’accent sur les expulsions des demandeurs d’asile déboutés. Qu’en est-il depuis ? Cette affaire a des conséquences désastreuses : les préfets et les policiers ont clairement mis le pied sur le frein quant aux reconduites à la frontière des familles avec enfants. Quel préfet irait prendre un tel risque aujourd’hui après la bourrasque de l’affaire Leonarda ? Tout le monde est devenu très frileux… Les filières mafieuses des passeurs se sont aussitôt adaptées à cette nouvelle donne. Si bien que les passeurs font entrer prioritairement les familles avec enfants. Dès que les enfants sont scolarisés – et les écoles ont une obligation de scolarisation -, plus moyen de renvoyer les familles dans leur pays ! Sans parler des multiples recours des demandeurs d’asile qui allongent les procédures et créent de fait des situations humaines impossibles à gérer… François Hollande avait promis de diviser par deux le délai d’attente des demandeurs d’asile en le ramenant à 6 mois au lieu de 16 mois et quinze jours cette année. Cette promesse n’a pas été appliquée. Combien d’expulsions sont exécutées par an concernant les demandeurs d’asile déboutés ? Moins de 5 % des demandeurs déboutés sont éloignés. L’affaire Leonarda est, de ce point de vue, très marginale. Sur les 70 000 demandeurs d’asile, 12 000 obtiennent le statut de réfugié politique. Donc, 58 000 sont déboutés. Mais l’immense majorité reste sur le territoire en utilisant toutes les voies de recours possibles jusqu’à devenir des clandestins. Et comme je vous le disais, depuis l’affaire Leonarda, il n’y a plus d’expulsions quand il y a des enfants… En attendant, le budget consacré par la nation aux demandeurs d’asile et à l’immigration s’élève à 653 millions d’euros par an. Durant l’instruction, la France a une obligation de logement et d’allocation temporaire d’attente (11,37 euros par jour l’an prochain pour 31 760 personnes, soit 135 millions d’euros en 2014, NDLR) en hausse de 158 % entre 2008 et 2012, compte tenu de l’allongement des délais d’attente… Notre système du droit d’asile explose ! Manuel Valls promet de raccourcir les délais d’attente des demandeurs d’asile. Quel dispositif proposez-vous ? D’abord, partons de la situation actuelle : aujourd’hui, un demandeur d’asile attend une décision de l’Ofpra. S’il est débouté, il peut déposer un appel devant la Cour nationale du droit d’asile. S’il est une nouvelle fois débouté, il peut attaquer la décision qui le contraint à quitter le territoire français devant le tribunal administratif. Et là encore, il peut faire appel devant la Cour administrative d’appel, et pendant ce temps -là, il peut demander un réexamen de sa situation à l’Ofpra. Ma proposition est simple : le recours doit être limité à la Cour nationale du droit d’asile. Il n’y a qu’à cette condition que l’on réduira sérieusement le délai d’attente des demandeurs d’asile. Ensuite, il faut augmenter les moyens humains de l’Ofpra afin d’accélérer l’instruction des dossiers. Sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, une cinquantaine d’agents supplémentaires avaient été recrutés. Il faut renouveler cet effort et doter l’Ofpra de 50 agents supplémentaires. Et j’ajoute qu’il faut élargir la liste des pays sûrs, ceux pour lesquels l’asile politique en France ne peut être plaidé.]]>