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« Demain, la France sera-t-elle encore la France ? » Interview d’Eric Ciotti à Valeurs Actuelles

VALEURS ACTUELLES – Le député des Alpes-Maritimes apporte son soutien à Nicolas Sarkozy. Il s’inquiète du déclin identitaire, plaide pour un État « qui ne recule pas » et propose de faire « notre révolution » en matière de terrorisme.

Vous avez annoncé votre soutien officiel à Nicolas Sarkozy. C’était un secret de polichinelle… Pourquoi lui, finalement ?

Je suis un homme de droite, je l’assume et je le revendique avec fierté. Notre pays a besoin des valeurs de la droite : l’autorité, la liberté, la nation. Nicolas Sarkozy est celui qui porte le mieux ces valeurs. De plus, il conjugue l’expérience, l’énergie et la volonté. Nous aurons besoin de tout cela pour redresser notre pays. Regardez l’état dans lequel les socialistes vont laisser la France. Elle est à terre, menacée par le communautarisme, en faillite économique, en détresse sociale et décrédibilisée sur la scène internationale. Même dans nos pires cauchemars, nous n’avions pas envisagé un tel scénario ! Face à ce bilan si catastrophique, seul Nicolas Sarkozy peut redonner un souffle et une direction à notre pays.

Le soutenir est donc plus un choix politique qu’affectif ?

Les deux au contraire ! Je fais le choix de Nicolas Sarkozy aussi par fidélité. Je le connais depuis 1988, j’ai toujours cheminé à ses côtés et partagé ses combats. Je ne conçois pas l’engagement politique sans fidélité ni loyauté. Je ne ferai donc jamais partie de ceux qui se détournent quand la situation peut paraître moins favorable. Mon soutien à Nicolas Sarkozy est ancien, solide et durable. C’est celui qui fait l’analyse la plus pertinente de la situation de notre pays et qui propose les remèdes les plus adaptés pour y faire face.

Vous ne pouvez pas nier le rejet dont l’ex-président fait l’objet dans l’électorat ?

Je conteste totalement cette analyse. Nicolas Sarkozy s’est engagé sur un chemin de vérité avec les Français. Il est en capacité, j’en suis sûr, de les convaincre de le rejoindre autour de nos idées et du projet cohérent que nous avons adopté le 2 juillet dernier. La tendance est en train de s’inverser dans les enquêtes d’opinion. Rien n’est encore écrit. Mais j’ai une conviction, Nicolas Sarkozy gagnera la primaire.

Il répète qu’il a changé, peut-on le croire, cette fois ?

Je ne suis pas de ceux qui remettent en question le bilan de Nicolas Sarkozy, bilan dont je suis solidaire et auquel j’ai participé entant que parlementaire. J’ai voté pour ma part tous les textes de la précédente majorité sauf un, la loi pénitentiaire. Notre bilan est solide. Vous oubliez les circonstances, nous avons traversé une tempête inédite. Il a été un capitaine solide et il a évité la catastrophe économique à nos concitoyens, il a été un rempart et a fixé un cap sur la scène européenne où sa voix, elle, était audible.

Les difficultés économiques et sociales ont aussi perduré…

Je ne nie pas les difficultés en termes de chômage et de déficit. Mais nous nous comportions mieux que nos autres partenaires. Aujourd’hui, c’est très exactement l’inverse. Tandis que nos voisins sont sortis de la crise, nous y sommes encore sans le moindre espoir d’un changement profond si ce gouvernement reste au pouvoir.

Vous ne reniez donc rien ?

Non ! Je m’étonne d’ailleurs que certains n’aient pas eu la même autocritique au moment où ils siégeaient au sein du gouvernement.

Cette campagne de 2017, sur quels thèmes doit-elle être menée ?

Deux grands phénomènes inquiètent les Français. La peur du déclin identitaire et la peur du déclin social. Nombre de familles estiment que leurs enfants vivront moins bien qu’elles n’ont vécu. C’est une perspective totalement inacceptable. La précarité s’est installée, la crainte du déclassement l’a emporté. Nous aurons à y répondre. Un second sujet angoisse plus encore nos concitoyens, il déterminera d’ailleurs le résultat de l’élection présidentielle. C’est l’inquiétude du déclin identitaire que je résumerais par une question très simple : « Demain, la France sera-t-elle toujours la France ? » Quand je sillonne les rues de ma circonscription, c’est la question que l’on me pose souvent.

La France sera toujours la France !

Pas si nous ne faisons rien. Les Français ont l’étrange sentiment qu’on veut leur imposer des modes de vie qui ne leur correspondent pas, un modèle multiculturel voire communautariste que l’on récuse. Cette question s’assimile à une valeur essentielle résumée dans un ouvrage que j’ai publié l’année dernière, c’est celle de l’autorité. Les électeurs y sont très attachés. Nous devrons restaurer l’autorité sous toutes ses formes. Cela devra être une priorité.

Comment le faire ?

Réaffirmons que la France n’est pas une addition de communautés, il n’y a qu’une communauté nationale. L’État-nation doit réaffirmer sa primauté en rappelant qu’aucune loi religieuse n’est supérieure aux lois de la République. C’est ça, la laïcité. L’autorité, c’est s’assurer que la loi du plus fort ne s’impose pas à la loi de la République comme on le constate depuis quelques mois dans notre pays. L’autorité de la République, c’est choisir librement qui on accueille sur notre territoire. C’est l’inverse de la capitulation dans l’affaire Leonarda. On ne peut plus tolérer que la nation se désagrège sous le coup des corporatismes et des communautarismes. Il faut écrire un nouveau roman national autour des valeurs qui ont façonné notre histoire riche et glorieuse, une histoire dont nous ne devons pas nous excuser en permanence.

Maintenez-vous votre idée d’ajouter le mot laïcité à la devise de la République ?

Elle a fait débat. Plus que jamais ! J’ai déposé une proposition de loi constitutionnelle. Je souhaite d’ailleurs aller plus loin en précisant dans l’article premier de notre Constitution que, si la France est laïque, elle est de tradition chrétienne. Ça n’a pas pour moi une connotation religieuse mais bien culturelle. La laïcité est un indispensable rempart contre le communautarisme et contre sa dérive ultime, la radicalisation. Face aux menaces qui pèsent sur nos sociétés, on ne doit rien laisser passer.

Vous dénoncez l’absence d’autorité du gouvernement, mais, face à la CGT, il fait preuve d’un certain courage…

C’est une plaisanterie ! François Hollande est celui qui, dans l’histoire contemporaine, aura porté le plus atteinte à la valeur autorité. Il a affaibli notre pays, il a affaibli la fonction présidentielle, la ramenant à la pratique de la Ille République.

Nicolas Sarkozy élu président en 2017 ferait-il évacuer les zadistes du site de Notre-Dame-des-Landes ?

Bien sûr ! On ne peut pas laisser perdurer ces zones de non-droit. Ces dérapages doivent cesser. En 2017, l’État ne reculera plus, l’État sera de retour.

Vous évoquiez l’inquiétude des Français. Face à la menace terroriste, elle a décuplé. Notre pays est-il suffisamment protégé ?

Face à cette menace permanente, nous n’avons pas les armes matérielles, juridiques et psychologiques pour lutter efficacement. En matière de lutte contre le terrorisme, en matière de renseignement, on doit faire notre révolution. Il faut changer de cadre, s’inspirer de pays comme Israël qui vivent avec le terrorisme et qui y font face. On reste très naïfs. Ces débats récurrents sur la défense de la liberté me scandalisent.

Vous plaidez pour un principe de précaution en matière de terrorisme. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit de protéger les Français. Tous les auteurs des attentats étaient connus, repérés, parfois suivis ou condamnés. Or, on n’a pas pu les empêcher de passer à l’acte. Ça doit cesser. Il y a trop de dispersion. Je prône une plus grande centralisation des services, il faut créer une équipe technique de type NSA et nous diriger, surtout, vers une rétention administrative. Des personnes que l’on sait dangereuses doivent y être placées. L’enjeu, c’est la prévention. Les dix mille soldats du dispositif Sentinelle n’empêcheront pas un attentat. On est davantage dans une opération de communication. Elle rassure, certainement, mais elle est inefficace.

Propos recueillis par Olivier Biscaye